Nous rapportons ici un témoignage d’un court séjour en Andalousie sur les azulejos (carreaux de céramique émaillés) décorent de nombreux édifices tels que palais et cathédrales. La visite du quartier de Triana à Séville et de la ville de Rambla-Cordoue vaut le détour.
LES AZULEJOS
Les azulejos se retrouvent en mésopotamie, en Egypte et en Perse antique. Ils se sont développés au travers de la culture islamique. Leur développement a été favorisé par la conquête musulmane de la péninsule ibérique au VIIIe siècle.
Les techniques ont évolué au cours des siècles pour atteindre leur apogée au cours de la période nasride des XIIIè et XIVe siècles. C’était peu avant la reconquista et le retrait des musulmans, chassés d’Espagne par les rois de Castille et d’Aragon, leur dernier bastion étant la ville de Grenade.
L‘intrication étroite des cultures chrétienne et musulmane au cours de ces siècles de cohabitation se retrouve au travers de plusieurs édifices. Les plus célèbres sont l’Alhambra de Grenade, l’Alcazar et la Casa de Pilatos à Séville et surtout la mosquée-cathédrale de Cordoue. Il s’agit là d’un immense édifice à base romaine sur laquelle a été érigée une mosquée aux multiples colonnades modifiée enfin en cathédrale. On y découvre une admirable juxtaposition des modes d’expression architecturaux et décoratifs des civilisations musulmane et judéo-chrétienne. Mais..
Les Azulejos de la Casa de Pilatos , sont les plus célèbres et les plus riches. Il s’agit de la résidence seigneuriale la plus importante de Séville. Tous les murs en sont recouverts. Ils représentent divers motifs dont les thèmes floraux, héraldiques ou géométriques. Ces azulejos sont typiques de la renaissance espagnole en première partie du XVIe siècle.
Voici ci-dessous des miniatures des azulejos dont est paré le rez-de-chaussée de la casa de Pilatos:
Voici quelques aperçus de la visite:
Azuelos de l’Alcazar


Azulejos de la Casa de Pilatos


Et ici dans la rue, sur les murs d’églises, sur les panneaux indicateurs…
Comment les azulejos ont-ils été réalisés?
Cela peut consister en assemblage de mosaïques juxtaposées » les alicatados » où des pièces de céramique monochrome sont découpées selon un modèle préalablement dessiné. L’apogée de cette technique date du royaume nasride qui siégeait à L’Alhambra de Grenade. Puis…
La technique de la « corde sèche » est un procédé d’origine musulmane, plus économique et plus simple à réaliser. Développée surtout au XVe siècle, elle est encore utilisée aujourd’hui. Elle consiste à délimiter sur le biscuit (au moyen d’une poire à bec fin) les champs de couleur des azulejos par un trait (appelé improprement corde). Celui-ci se compose d’un mélange d’huile et de pigments en poudre tel que l’oxyde de manganèse. Enfin…
On arrive à la technique de l’arête où la délimitation des champs de couleur se fait par de fines arêtes en relief. Il n’y a que 2 cuissons, celle du biscuit qui se fait à 980°C et une 2ème cuisson à basse température entre 980-1080°C après la corde sèche et application des émaux.

LA POTERIE ANDALOUSE
Triana, quartier de Séville s’étend au bord du fleuve Guadalquivir, lieu ancestral de production de faïences et d’azulejos. C’es un quartier très animé où se trouve le musée de la céramique et des boutiques ou des ateliers de potiers. Les usines ont définitivement fermé leurs portes, la dernière en 2012 étant celle de Manuel Garcia Montalvan.


Les époques de la céramique à Séville
La renaissance connut l’arrivée à Séville d’un italien Nicoloso Francisco Pisano mort en 1529 à Séville. Il apporte à Séville la connaissance de l’ornementation de la renaissance italienne. Il introduit la peinture au pinceau qui se poursuivra jusqu’à aujourd’hui. Il met en action sa vision commerciale et développe une production semi-industrielle en créant en particulier l’azulejo de arista. Il s’agit de la technique » à l’arête » qui s’est substituée à celle de la corde sèche. Elle a permis à partir d’un moule la reproduction des azulejos à l’identique, avec pour conséquence le développement d’un commerce massif.

L’époque baroque: après un déclin économique et social de 1650 à 1700 survient au milieu du XVIIIe siècle une extraordinaire vitalité des peintures sur faïence. Elle se manifeste par un équilibre entre une technique plus raffinée et une décoration plus expressive

La révolution industrielle des 19e et 20e siècles est représentée par les méthodes d’un anglais, Charles Pickman (1808-1893). Il introduit d’Angleterre de nouveaux concepts de fabrication, de transport et de stratégies commerciales. Cette période est appelée la seconde renaissance de la céramique sévillane.

La contestation des méthodes industrielles apparait dès le milieu du 19ème siècle. La production industrielle massive s’accompagne rapidement d’une revendication de retour aux méthodes pré-industrielles qui favorise la création artistique

Les boutiques et ateliers à la sortie et dans les rues de Triana:
Elles remplacent les usines et proposent à la vente une grande variété de produits de caractère standardisé.
Musée de Rambla-Cordoue et les ateliers de production
Le musée est construit à proximité du terrain où étaient extraits deux types d’argile depuis l’antiquité. Il donne à voir quelques vases antiques comme ci-dessous.

Il organise chaque année un concours et expose premiers prix obtenus par les artistes avec une grande variété.
Plats ayant obtenu le 1er prix

A la sortie de la ville, la zone polygonale industrielle est occupée par de véritables supermarchés de la céramique contigus dont voici un exemple et…
On se sent submergé devant une telle abondance qui ne satisfait pas notre besoin de dénicher des objets simples décorés avec moins d’ostentation. Alors…
On s’arrête au forum de la céramique à Séville : un marché potiers se tient à deux pas de notre hôtel. Découverte d’un stand de vente de matériel « esmalte y barro » intéressant à des prix attractifs et de contact très sympa (le vendeur m’a offert deux outils de sculpture) mais il faut voir le coût du transport. Arrêt au stand de Beatriz Renfigo Ruiz, qui a son atelier à La Triana et à qui j’achète 2 azulejos en photo ci-dessous. Et…

On termine avec le stand d’Isabel Garcia de Valencina de la concepcion (qui s’exprimait très bien en français) dont les poteries en grès nous ont plu, sobres, délicates avec des émaux « maison » de belle composition.