Juxtapositions d’un émail vert

Comment juxtaposer des nuances d’émail vert ?

Choisir les types d’émaux à juxtaposer. Pour cela, je fais un choix d’oxydes parmi les différents émaux de couleur verte créés précédemment.

L’idée est de déposer au pinceau des strates d’émail juxtaposées et de voir si les couleurs attendues sont préservées ou modifiées.

1ère étape: composer chaque émail

Je compose 100g de base « Vienne 2025 » sans Oxyde d’étain et sans Oxyde de Chrome. J’ai divisé cette base en 4 pots de 25g chacun.

J’ajoute dans chacun des pots :

N°1 Oxyde de chrome 0,025g;

N°2 Oxyde de chrome 0,05g;

N°3 Oxyde de Cuivre noir 0,16g;

N°4 Ox. de Chrome0,082g+Ox. de Cuivre noir 0,082g+Carbonate de Cuivre 0,25g

Je ferme les pots avec leur couvercle et j’agite dans tous les sens pour mélanger la poudre de la base avec l’oxyde.

Je prépare de la CMC diluée dans l’eau à la concentration de 6g/l. J’ajoute 20ml d’eau + CMC dans chaque pot et mélange le tout avec un bâtonnet. Ceci permet d’étaler l’émail au pinceau sans laisser de traces de pinceau.

2ème étape: déposer sur un pot

J’applique les strates d’émail au pinceau en 2 couches selon les N° de pot .

Cuisson Cône 6 en oxydation au four électrique à 1200°C.

L’émail N°1 est vert très clair, comme attendu. Le N°2 ( oxyde de chrome à 0,20g/100g) est vert plus foncé, comme prévu. Aucune trace de l’émail N°3 Oxyde de Cuivre noir déposé en bande. Enfin, l’émail N°4 ne se distingue pas franchement du N°3.

Conclusion: l’application au pinceau de strates d’émail de concentration d’oxydes différentes crée des juxtapositions intéressantes. Mais cette juxtaposition d’oxydes différents entraîne cependant des modifications de couleur. Ici, l’oxyde de chrome a supprimé la couleur sombre attendue de l’oxyde de cuivre noir.

 

Fabriquer un émail vert

Comment faire un émail vert?

Il s’agit de faire un émail de couleur verte destiné à être appliqué sur du grès

Première étape: choisir la base de l’émail

J’ai opté pour un émail cône 6, c’est à dire cuit à 1200°C. Je vais dans Glazy.org

Je vais sur « Recipes » et coche dans mes recherches les rubriques: « White »/Oxydation/Cone6/Glossy/Opaque

J’obtiens une liste d’émaux blancs et en choisis un parmi mes préférés.

Dans cet essai, j’ai pris ma base Vienne 2025 utilisée habituellement pour l’émail rose, duquel j’ai retiré l’Oxyde d’étain et l’oxyde de Chrome.

Il reste la base:  Wollastonite: 25, Ferro Frit 3134: 20, Kaolin: 20, Silice: 20, Feldspath potassique: 15, Zircopax: 5 et Bentonite: 2

Email : BASE

 Vienne 2025

Auteur :

Daniel PORTALEZ

 
Wollastonite   25
Ferro Frit 3134   20
Kaolin   20
Silice   20
Potash Feldspar   15
Oxyde étain   5
Zircopax   5
Bentonite   2

Ensuite, 2ème étape

Deuxième étape: choisir les Oxydes

Aller sur Glazy.org et entrer les critères : « Green »/Oxydation/Cone6/Glossy/Opaque

Je n’ai changé que la couleur. On obtient une liste d’émaux. Je clique sur chacun d’entre eux et ne retiens que les oxydes utilisés. Les trois plus courants sont: Oxyde de Chrome, Oxyde de Cuivre Noir et Carbonate de Cuivre.

Je note les concentrations utilisées pour les types de vert proposés puis…

Troisième étape: faire les essais

OXYDES
1 Ox Chrome 0,66
2 Ox Cuivre noir 0,66
3 Carb Cuivre 0,66
4 Carb Cuivre 1,32
5 Carb Cuivre 2
6 Carb Cuivre 2,64
7 Ox Chr +Ox Cu Noir 0,33 + 0,33
8 Ox Chr + Ca Cu 0,33 + 1
9 Ox Cu N + Ca Cu 0,33 + 1
10 Ox Chr + Ox Cu Noir + Ca Cu 0,33+0,33+1

Je prends 100g de base. Attention, certains composants comme la wollastonite doivent être tamisés au tamis 80.  Je divise par 10 la concentration des oxydes données dans le tableau ci-dessus. Exemple: Oxyde de Chrome 0,066g…

J’ajoute chaque oxyde à la base dans 10 petits gobelets différents numérotés de 1 à 10. J’ajoute 7ml d’eau et mélange soigneusement avec un bâtonnet.

Je dépose au pinceau 3 couches alternées de ce mélange sur chaque tesson également numéroté. Enfin…

Quatrième étape: la cuisson et le résultat

Cuisson en four électrique à 1200°C (cône 6)

1=Ox.Chr 0,66 2=Ox.Cu noir 0,66 3=Ca. Cu 0,66
Ca Cu 3=0,66; 4=1,32; 5=2; 6=2,64

 

7=OxChr+OxCuNoir; 8=OxChr+CaCu; 9=OxCuNoir+CaCu; 10=OxChr+OxCuNoir+CaCu

Les couleurs varient entre le vert et le turquoise

Le plus difficile: faire un choix!

CMC (carboxy-methyl-cellulose)

La CMC ou carboxy-méthyl-cellulose

Qu’est-ce que c’est, à quoi ça sert et comment l’utiliser?

Gel d’origine synthétique, éther de cellulose très hydroscopique, c’est-à-dire qu’il se lie aux molécules d’eau pour former un gel.

Où le trouve-t-on? En pharmacie ou en droguerie ou le commander en ligne

En poterie, il a trois usages:

1/ Faire de la barbotine pour restaurer les fissures d’une poterie crue, avant cuisson.

Voyons la création de la barbotine: 30g/1L d’eau

Prendre 6 g de CMC et les diluer dans 10ml d’eau dans un petit pot en verre, en mélangeant avec un petit bout de bois. Cela donne une gélatine qui colle aux parois. Mélanger jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de grumeaux. Ne pas ajouter de vinaigre blanc comme je l’avais suggéré auparavant. J’ai essayé les deux (avec et sans vinaigre) et incontestablement l’ajout de vinaigre nuit à la propriété collante de la barbotine. Donc, mieux vaut éviter d’en ajouter.

Mettre cette solution dans 200ml d’eau et mélanger au mixeur

Ajouter 150g d’argile sèche, broyée et tamisée au tamis 80

Mélanger au mixeur

On obtient une bouillie épaisse : la barbotine. Elle est utilisée pour réparer les fissures des poteries non encore cuites, pour coller des anses. Si le pot est déjà un peu trop sec, l’humidifier au pulvérisateur là où on veut coller l’anse à plusieurs reprises avant la pose.

Pour l’utiliser, voir « les fissures d’un plat »

2/ Il sert également à restaurer un émail.

L’émail n’a pas collé partout sur la pièce. Par endroits, la terre nue apparaît. Rien de bien grave, chauffe ta pièce (soit sur le four que tu viens de lancer, soit dans le four de cuisine à 180°). Prépare l’émail et ajoute la CMC diluée dans de l’eau en très faible quantité (1g de CMC /10ml d’eau dont tu prélèves 1g pour ton échantillon d’émail). Ainsi, tu peux passer ton émail au pinceau sur la pièce chauffée et la faire recuire.

3/ Appliquer l’émail au pinceau sur un pot

Appliquer l’émail au pinceau sans laisser les traces du pinceau est délicat. Cela demande de l’habileté et de l’entraînement. L’ajout de CMC à l’émail (30g/litre) rend l’émail un peu gélatineux et permet de l’appliquer au pinceau sans laisser de traces. S’il y a encore des traces visibles ( c’est variable selon le type d’émail) on augmente la quantité de CMC jusqu’à 60g/litre).

 

Aplanir une assiette

Une série d’assiettes en grès a séché lentement, entre deux linges et deux rondeaux. Je les ai retournées matin et soir et après séchage, elles me paraissent bien planes.

Après cuisson à 980°C pour le dégourdi, le fond de plusieurs assiettes n’est pas plat. Si je les pose sur la table de la crouteuse, elles dansent un peu lorsque je les manipule.

Comment aplanir le fond d’une assiette?

La vidéo ci-dessous montre comment faire:

1/ Tamiser du sable roux avec le tamis 80  et le déposer sur la table.

2/ Déposer l’assiette sur le sable et la faire bouger avec la main placée dessus.

3/ En la retournant, on voit les traces de sable sur les endroits surélevés qu’on entoure au crayon de papier

4/ Poncer les marques à la meuleuse jusqu’à disparition

5/ Reposer l’assiette sur la table pour vérifier qu’elle est bien plane.

Si ce n’est pas le cas, recommencer l’opération plusieurs fois

Fabriquer des cônes pyrométriques

Cette idée de vouloir fabriquer ses propres cônes pyrométriques  m’est transmise par Michel Ponsa ( Narbonne). Nous l’avons rencontré au marché de printemps de Pech-Celeyran (Aude) le week-end dernier.

Ce potier amateur, créateur inventif, a fabriqué son propre tour, son four-à-gaz et bien d’autres choses… Ce qui va suivre est issu d’un document qu’il m’a remis en main propre. Il  décrit la fabrication d’une montre fusible (cône pyrométrique). En voici les 4 étapes:

Les 4 étapes de la fabrication d’un cône pyrométrique

1/ Disposer d’un moule en plâtre pour le cône

2/ Fabriquer la bouillie

3/ Assembler la poudre selon le type de cône pyrométrique

4/ Mélanger la bouillie et la poudre pour obtenir la pâte

Voyons ces 4 étapes

1/Fabriquer un moule en plâtre

Pour fabriquer un moule, voir la courte vidéo de Marc Duquesnoy  peut aider (remplacer le serpent par un cône). Il vaut mieux ne faire qu’un cône à la fois.

2/Fabriquer la bouillie

Le procédé est issu d’une communication de Clara Giorella, céramiste renommée de nationalité argentine. N’ayant pas retrouvé l’article originel, je reproduis ici le document de Michel Ponsa.

Solution A: 100ml d’eau tiède +3g de CMC * ( carboxy-méthyl-cellulose) disponible en pharmacie ou en droguerie.

Solution B: 40ml d’antigel de voiture (liquide de refroidissement) + 40ml d’eau + 20ml de solution A soit 100ml.

3/ Assembler la poudre avec les composants selon le cône choisi (encore appelée montre fusible)

Les composants sont les mêmes pour les cônes 05a, 06a et 07a destinés à contrôler la cuisson des dégourdis. Ils sont les mêmes pour les cônes 8 à 11 destinés à contrôler la cuisson des émaux haute-température appliqués sur les grès.

960°C – montre 0.7a  (g/%) : 38,2/76,4 Fritte 1254 – 11,8/23,6 Talc – 5,9/11,8 Craie – 23,5/47,0 Silice – 11,8/23,6 Alumine

980°C – montre 0.6a  (g/%) : 34,8/69,6 Fritte 1254 – 10,4/20,8 Talc – 7,8/15,6 Craie – 33,5/67,0 Silice – 13,4/26,8 Alumine

1000°C – montre 0.5a  (g): 30,8 Fritte 1254 – 9,2 Talc – 8,9 Craie – 37,8 Silice – 13,2 Alumine

1250°C – montre 8  (g/%): 21,1/42,2 Kaolin T – 23,5/47,0 Feldspath K  – 10,3/20,6 Craie – 45,1/90,2 Silice – 0/0 Alumine

1280°C – montre 9  (g/%): 21,1/42,2 Kaolin T – 21,1/42,2 Feldspath K  – 9,3/18,6 Craie – 47,9/95,8 Silice – 0,7/1,4 Alumine

1300°C – montre 10  (g): 19,3 Kaolin T – 19,3 Feldspath K  – 8,5 Craie – 51,1Silice – 1,9 Alumine

1320°C – montre 11  (g): 16,4 Kaolin T – 16,4 Feldspath K  – 7,2 Craie –  56,2 Silice – 3,7 Alumine

4/ Mélanger la poudre et la bouillie: la pâte

La préparation du mélange se fait dans un bocal de verre.  Pour 100g de poudre correspondant à la montre choisie (selon la composition ci-dessus) ajouter 35g de solution B. Fermer le couvercle du bocal et bien agiter pour obtenir une pâte homogène.  Pétrir la pâte sur un rondeau en plâtre  avec un couteau. Ensuite, estamper le colombin sur un film plastique qui recouvre la cavité du moule.  Il est recommandé de faire les montres une-à-une. C’est plus facile à manipuler et à démouler.

 

Les cônes pyrométriques

Cône pyrométrique: en quoi ça consiste?

Voir le blog-du-bol de Sarah qui explique ça très bien. En résumé: c’est une petite pièce de céramique en forme de cône qui est placée dans le four pour mesurer la quantité de chaleur au cours d’une cuisson. Lorsque le cône atteint une certaine quantité de chaleur, il va se courber plus-ou-moins. Il s’étale complètement si la chaleur est trop forte pour la mesure. Il sert donc à mesurer le degré de température pendant un temps déterminé.

Comprendre la notion de quantité de chaleur

Si je mets le doigt dans une casserole d’eau bouillante, je ressens la chaleur. Si je ne fais qu’un aller-retour rapide avec le doigt, je ne me brûle pas (ou pas trop). A laisser le doigt ne serait-ce que quelques secondes, je me brûle. Pareil pour faire cuire une viande au four, on pré-chauffe le four pendant 10min à 180° car c’est le temps qu’il faut pour atteindre cette température. Au total, le cône mesure la dynamique de cuisson.

Cônes pyrométriques ou montres fusibles ?

C’est la même chose: les cônes sont également appelés « montres fusibles », terme que je préfère car il indique à la fois la notion de temps et le procédé physique.

Pourquoi utiliser des cônes ?

Ils servent à connaître les performances du four. Celui-ci peut avoir des résistances altérées. Une panne intermittente d’électricité va altérer la cuisson. Ils complètent l’information d’une canne pyrométrique qui donne seulement la température interne instantanée du four.

Le tableau de SEGER

Une grande variété de cônes différents sont conçus pour fondre à une accumulation de chaleur déterminée. Le tableau de référence de Hermann Seger indique les numéros de cônes correspondant à une température déterminée pendant un temps donné au cours des 100 derniers degrés. Selon ce tableau, les 100 derniers degrés sont affichés à 60°C/h pendant 1h40, à 150°C/h pendant 40 min. ou à 15°C/h pendant 6h40 délivrant la même quantité de chaleur. Par exemple, pour le biscuit, on choisit des cônes entre 05 et 08 et pour les émaux des cônes entre 6 et 10.

Où se les procurer ?

On les trouve chez tous les distributeurs de produits pour la céramique, pour un prix d’environ 1,5€/cône, ce qui représente un budget. Il y a des cônes auto-portés qu’on place directement dans le four et des cônes nécessitant un support, un peu moins chers mais qu’il faut savoir disposer sur un support (acheté ou fabriqué en argile). Attention! :  bien respecter l’angle d’inclinaison.

Chez Cigale et fourmi
Cigale-et-fourmi
Support pour cônes pyrométriques
Grand modèle
Petit modèle
cône autoportant

On peut aussi fabriquer ses propres montres fusibles (voir l’article correspondant)

En pratique

image issue de cigale-et-fourmi

Trop cuit à gauche, pas assez cuit à droite, cuisson correcte au milieu

 

On utilise en général 3 cônes placés sur un support comme ci-dessus. Les 3 cônes sont différents et encadrent le cône de référence donné dans le tableau de Seger. Exemple: pour un émail référencé « cône 6 » dans Glazy.org , je choisis des cônes 5, 6 et 7 .

On ne met pas les montres fusibles à toutes les cuissons. Ils sont utiles lors de l’achat d’un four à la 1ère cuisson pour évaluer la cuisson du four . Ils nous informent  que le programmateur étalonne correctement la cuisson demandée et que le four répond à la programmation affichée. Après une trentaine de cuisson, ils informent que le four conserve sa puissance sans altération des résistances. Enfin, ils sont utiles dès qu’on remarque une altération d’un émail par rapport à ce qu’on obtient d’habitude.

Faire une assiette

Faire une assiette, ça a l’air simple mais il faut qu’elle ait la bonne épaisseur, la bonne dimension, qu’elle soit bien plate et pas voilée, sans parler de la déco…comment faire?

On peut la tourner mais franchement je déconseille, c’est fastidieux et pas souvent réussi au séchage (voir l’article sur les fissures). Il faut mieux la modeler en étalant la pâte avec la crouteuse. Voyons les différentes étapes:

1/ Choisir un grès avec chamotte fine 0,2mm ( le grès est à usage alimentaire)

2/ En prélever environ 1Kg, l’aplanir à la main et l’étaler à la crouteuse

On fait plusieurs passages en réduisant progressivement l’épaisseur

A chaque passage on retourne la plaque d’argile et on la tourne d’1/4 de tour

jusqu’à l’épaisseur voulue, ici un demi-pouce (un pouce = 2,54cm). La demi-graduation égale 1/8 d’inch (pouce) soit 3,175mm d’épaisseur choisie pour une assiette de 25,4cm (10 pouces ) de circonférence (voir ajustement en fin d’article)

3/ Bien lisser la pâte avec une éponge fine humide afin d’enlever les traces de la toile. Mettre un rondeau par dessus et découper tout-autour

4/ Renverser le rondeau et le placer sur la girelle du tour

5/ Prendre le diamètre et découper à la dimension choisie

6/ Lisser avec l’éponge fine

On peut relever le bord à la demande avec un outil à bord mousse en contrôlant l’intérieur avec le doigt et le tour est joué.

7/ On laisse sécher sur un rondeau. Recouvrir d’un morceau de drap et un rondeau plus petit par dessus. Retourner l’ensemble matin et soir jusqu’au séchage.

8/ Tournassage: facile car c’est bien plat, juste affiner le bord avec un papier abrasif fin.

9/ Cuisson : température maximum 980°

10/ Déco: émaillage à haute-température car destiné à un usage alimentaire

11/ Tests de résistance physique et test de l’émail en laboratoire avant de la proposer à la vente

18 mai 2025 Ajustements

J’ai réduit de moitié l’épaisseur des assiettes et des plats qui font désormais 1/16ème d’inch soit 1,588mm. Je les dépose entre deux rondeaux et recouvre d’un sac de sable. Je les laisse sécher une dizaine de jours avant de les poncer au papier-verre fin.

 

 

Le spleen du potier

Que faire quand tout va de travers?

Quand tout va mal

22/03/2025 Aujourd’hui c’est décidément pas mon jour, je n’arrive à rien. Je prends de la terre W11 lisse recyclée et la pétris puis la divise en mottes de 400g. La motte se met à tanguer et j’arrête. Avec une autre, même chose.

Pour changer, prenons plus gros:  je prends une motte de 4 Kg et la pétris du mieux que je peux avant de la placer sur le tour. Elle monte bien, descend à souhait, tourne bien droit, je reprends espoir et décide de faire un grand saladier. J’en ai déjà fait plusieurs de différentes formes donc je suis plutôt confiant. Je creuse le centre et tourne les parois sous forme d’un tube qui tourne bien droit. J’atteins les 35 cm de haut et commence à élargir tout en tournant. Tout va bien et puis à 35cm de largeur alors que j’ai pratiquement terminé, le bord s’affaisse et  impossible de rattraper, je recycle la terre.

Prendre plus petit:  je prends 2kg toujours de la même terre et obtiens le même résultat. C’est à n’y rien comprendre. Stop! je nettoie les outils, range la terre et quitte l’atelier, à la fois déçu et troublé et je m’interroge.

Est-ce un problème technique? Est-ce la terre recyclée qui me joue des tours, l’ai je trop mouillée ou pas assez? Et bien non, je pense que c’est ce qu’on se dit pour se disculper de son propre échec.  Il en va du tournage comme d’autres activités, il y a beaucoup de jours où tout va bien, heureusement, et il y a parfois des jours où tout va mal. C’est un problème humain.

Pourtant, la météo est au beau fixe, je rentre d’une semaine de vacances, aucune mauvaise nouvelle, autour de moi tout va bien et le moral est bon. Alors, que faut-il en penser?

J’émets l’idée que cet échec est dû d’abord à un défaut de concentration. Quoique de bonne humeur, j’ai plusieurs choses qui me trottent dans la tête, insignifiantes pour la plupart. Ces choses-là créent une dispersion de l’esprit et perturbent la position des mains. Je crois qu’il y va aussi d’un excès de confiance en moi. Ayant réussi à plusieurs reprises à tourner des séries de grands plats, saladiers… je suis devenu plutôt relax. Je ne me suis pas assez appliqué comme je le fais d’habitude, en prenant le temps qu’il faut à toutes les étapes du tournage.

Alors que faire? Ce soir, je décide de faire autre chose, de prendre l’apéro, de me changer les idées. Mais bien sûr, il faut que je recommence demain.

Je vais m’efforcer de tourner en ne pensant qu’à ça et de prendre mon temps. Bien malaxer la terre sur la plaque de plâtre. Monter et descendre la motte trois fois. Centrer la motte et aplanir le haut. La mouiller le moins possible pour qu’elle tienne bien droite. Tourner bien régulièrement et lentement, pour que l’épaisseur soit la même partout. Creuser le centre et vérifier l’épaisseur du fond d’environ 1cm au moyen de la pique. Mettre à plat le fond en ramenant la terre sur la paroi. Prendre l’estèque en bois pour aplanir le bord extérieur. Régulariser le bord supérieur après chaque passage de tournage, au besoin en la coupant avec le fil métallique ou de nylon. Je dois être attentif, régulier, en résumé : zen et concentré.

30/03/2025: ça marche, même avec de la terre recyclée plusieurs fois, en m’appliquant, en prenant le temps et en ne pensant qu’à la position des mains: être zen et concentré, c’est le secret du tournage.

 

Céramiques à usage alimentaire

Des contrôles récents sur les marchés et dans les ateliers agitent les réseaux de  potiers. Certains décident de ne plus faire de poteries à usage alimentaire. Ils ne peuvent pas supporter les frais occasionnés par les tests d’émaux en laboratoire (environ 250€).  Faut-il suivre leur exemple ou bien se mettre en règle?

Actualisation des règlements

J’actualise ici les dispositions règlementaires françaises et européennes concernant l’usage alimentaire des poteries destinées à la vente.

Il faut pouvoir assurer à la personne à qui on vend un article de son innocuité pour un usage alimentaire. Cela repose sur le principe de garantie d’inertie du matériau vis-à-vis des denrées alimentaires.

La DGCCRF (Direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes qui dépend du ministère des finances publie une fiche qui résume la règlementation actuelle:

En introduction de l’article de la DGCCRF , le règlement (CE) n°1935/2004 du 27 octobre 2004 – article 3. Il prévoit que les matériaux destinés à entrer en contact avec des denrées alimentaires, sont fabriqués conformément aux bonnes pratiques de fabrication. Les matériaux ne doivent pas céder aux denrées alimentaires des constituants en une quantité présentant un danger pour la santé humaine. Ils ne doivent pas entraîner une modification inacceptable de la composition de la denrée. Les matériaux ne doivent pas altérer  les propriétés organoleptiques de la denrée alimentaire.

Les textes d’application

Des textes d’application de ce règlement définissent les règles (composition, critères de pureté, etc.) permettant d’assurer le respect de ce principe d’inertie.

Directive 84/500/CEE du 15 octobre 1984 transposée dans l’arrêté du 7 novembre 1985. Seuls les objets en céramique (dite « traditionnelle ») font l’objet d’une réglementation partielle de l’Union européenne.

Des fiches d’orientation

En l’absence de texte réglementaire spécifique, la DGCCRF élabore des fiches destinées aux services et laboratoires officiels de contrôle. Ces fiches  définissent les modalités de vérification du principe d’inertie de l’article 3 du règlement (CE) n°1935/2004 du Parlement européen et du Conseil du 27 octobre 2004. Leur publication sur le site Internet de la DGCCRF informe les opérateurs sur les critères utilisés par ses services pour les contrôles officiels.

Les références de la règlementation

Ci-dessous les références de la règlementation européenne à laquelle se rattache la règlementation française:

  • Document 32007R0333 de la commission du 28 mars 2007 consolidé le 30 avril 2024
  • Règlements (CE):                                                                                                                   – 333/2007 de la Commission du 28 mars 2007 : contrôle officiel des teneurs en plomb, en cadmium, en mercure, en étain inorganique, en 3-MCPD et en benzo(a)pyrène dans les denrées alimentaires                                           -1935/2004 du parlement et du conseil du 27 octobre 2004 : matériaux destinés à entrer en contact avec des denrées alimentaires                                      -2023/2006 de la commission du 22 décembre 2006:  bonnes pratiques de fabrication des matériaux destinés à entrer en contact avec des denrées alimentaires
  • Arrêté du 7 novembre 1985 (transposition de la Directive 84/500/CEE du 15 octobre 1984) : limitation des quantités de plomb et de cadmium extractibles des objets en céramique.

Liens utiles :

Arsenic, aluminium, cobalt: Morgane Louis-Gobin

Quand l’émail est un poison : Joëlle Swannet

Vos émaux sont-ils toxiques ? Axel-et-Bois

Taux d’arsenic testé en laboratoire trop élevé : Giom von Birgitta

Seul un test en laboratoire permet d’assurer qu’une pièce de céramique à usage alimentaire ne présente pas de risque de migration de substances nocives.

En pratique

Après réflexion, je suis conscient que je ne peux affirmer que l’émail qui recouvre ma pièce satisfait complètement à la règlementation. Or, le caractère « à usage alimentaire » est une notion strictement juridique. Donc je ne vais désormais utiliser que les émaux que j’ai déjà fait tester en laboratoire.

J’envoie dès aujourd’hui à Eric Swannet une demande  de pré-analyse de l’émail rose  que je viens de créer. Sa réponse est rapide:  » l’émail n’a pas de déséquilibre manifeste, juste une petite carence en alumine. L’analyse semble utile pour rechercher une éventuelle migration de chrome VI et d’alumine. Le test en laboratoire va suivre.

Les fissures d’un plat

Les fissures traversantes au fond d’un plat

Une fissure apparaît au séchage sur le fond d’un plat.

Si elle n’est pas traversante on peut la réparer.  Préparer de la barbotine de la même terre mélangée à du papier hygiénique broyé ( ou de la carboxy méthyl cellulose ou de la colle à papier peint) et à du vinaigre blanc. Pour un pot à yaourt , mettre 2 segments de papier hygiénique et une cuillère-à-café de vinaigre blanc avec la terre et de l’eau et bien mélanger à la cuillère. Humecter la fissure, la gratter au scalpel et lisser. Pour en savoir plus, consulter l’article d’Emilie des neo-céramistes

Si elle est traversante, inutile d’essayer de la réparer ça ne marche pas, elle revient au séchage.

Ci-dessous, fissure traversante d’un plat-à-tarte en terre-à-feu.

La fissure traversante se voit à l’endroit et à l’envers du fond du plat. Je l’ai observée sur nombre de plats-à-tarte. J’ai essayé au tournage de bien étaler la terre en la ramenant vers le centre et en l’écartant vers le bord plusieurs fois, de bien éponger le fond à l’éponge, rien n’y fait, une fois sur deux j’ai ce problème récurrent. Les plats partent systématiquement au recyclage. D’où cela vient-il ?

Cela provient d’une rétraction inégale de la terre, par inclusion d’une bulle. La solution ( mais peut-être n’est-ce pas la seule): en fin de préparation de la terre sur la plaque de plâtre, constituer un cône (image de gauche) puis installer la motte avec le cône inversé sur la girelle (image de droite). Cela évite d’emprisonner des bulles.

Résultat, je n’ai plus trop de souci sauf avec de la terre recyclée insuffisamment préparée qui peut contenir des bulles. Ci-dessous un plat sans fissure

Si la fissure apparaît après la cuisson du biscuit, le plat est mis au déchet, impossible de réparer.